Green trip & fashion story

Photo Julio Piatti - www.juliopiatti.com

Quand j’étais enfant, nous vivions à la campagne, isolés du monde. Le village le plus proche était à plusieurs kilomètres. Santiago, à une heure de route. Je ne connaissais ni buildings, ni immeubles, ni avenues, ni métro. Je pouvais passer des heures à chercher une araignée dans les montagnes. Je frappais le sol, et au bout d’un moment, elle sortait. Une belle mygale toute duveteuse, que je faisais courir sur mon bras.

Mes parents avaient l’habitude de partir à cheval dans la Cordillera de la Côte, à 1400 mètres d’altitude. Ils prenaient des fusils de chasse pour se protéger des pumas, et aussi de la viande séchée, des biscuits, du pain de la ferme qui durait plusieurs jours, mettaient tout dans des paniers, et traversaient la Cordillera par un passage étroit, réservé habituellement aux bêtes. La montée n’était pas facile, mais une fois en haut, on avait une vue fantastique sur la vallée et les forêts de sapins. Ils passaient par des cavernes où durant la journée, se cachaient toutes sortes d’animaux aujourd’hui en voie d’extinction, croisaient des troupeaux de bœufs et de moutons sauvages. Les forêts regorgeaient aussi de perroquets choroy, une espèce endémique du Chili. Ils en ramenaient d’ailleurs souvent à la maison, mais les bestioles étaient si odieuses et si difficiles à apprivoiser, que nous finissions par les relâcher. Quand ils étaient à moitié de chemin, qu’il y avait de l’eau proche et que la vue paraissait la plus belle, ils installaient leurs tentes dans la forêt et faisaient un feu pour éloigner les pumas. De là, on voyait toute la vallée centrale. Des aigles passaient au-dessus de leurs tentes jusque tard le soir et de grands condors se promenaient dans le ciel comme s’ils faisaient une simple balade. J’y pense souvent quand on me parle de protection de la nature. Une question qui ne se posait pas en ce temps là. On ne trouvait pas de papiers par terre, pas de mégots, pas de canettes vides. On se baignait dans les rivières. C’était simple. Comme cela devrait toujours l’être. C’est un peu comme une belle chemise blanche à laquelle on tient. On voit ce beau tissu bien net et propre, et on n’a aucune envie de le tâcher. On espère même le garder le plus longtemps possible exactement tel qu’il est.

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