Wyoming, angoisse sur le vol 5477

Certains s’imaginent que mes voyages sont des piece of cake. Otez vous tout de suite cette idée de la tête. Vous voulez un exemple ? Wyoming par Salt Lake City (parce que pas de vol direct depuis Santa Fe bien-sûr). 4 heures de retard au décollage, avec tout le monde déjà dans la cabine de la taille d’un fortune cookie et un simili jazz en fond sonore (rien de tel qu’un solo de trompette à 7 heures du matin). Le vol étant normalement d’environ 1h30, pas de toilettes, ni biscuits ni de boissons alcoolisées évidemment. Juste de l’eau. Et quand on vous annonce que cinquante avions attendent avant le vôtre, qu’une summer monsoon déferle dehors, et que vous voyez des agents de maintenance s’activer autour de l’appareil comme s’ils s’étaient envoyé une piscine de Red Bull, ce n’est pas assez je vous assure.

Ce que je préfère dans ces cas là, ce sont les réactions des gens. Le steward était très décontracté. Le Dean Martin de l’aviation. De toute façon dit-il, une tornade nous attendait à Cody, Wyoming, D’ailleurs, ajouta t-il pour faire montre de savoir, le Wyoming était célèbre pour ses « intempéries ». Une tornade classée F4 sur l’échelle de Fujita avait anéanti un village et abattu une forêt de pins pas plus tard que la semaine d’avant.

A côté de moi, un père et son fils. Enfin, on ne voyait pas le père, mais j’imaginais que derrière les couches et autres délicieusetés parfumées, se trouvait un père. L’enfant ne braillait pas encore mais j’attendais. Après, nous avions Britney Spears au téléphone avec une amie qui je compris se trouvait sur le tarmac, mais avec le niveau sonore de la conversation elle aurait pu être à Pékin. Encore après, mes préférées, deux femmes demandant toujours quelque chose « Vous avez des crakers ? » «C’est lamentable le service, tu ne trouves pas ? » « On va se plaindre à Travel Net», « Steward? », «Eh, vous, Steward !!! » Franchement, pas la peine de me proposer un poste d’hôtesse. Tout le monde serait mort dans l’heure.

La bonne nouvelle c’est, nous avons finalement décollé. La mauvaise nouvelle c’est, nous avons finalement décollé. Le steward avait raison. Une tempête phénoménale nous attendait à Cody. Dans le mini aéroport, un groupe de locaux tenait bon, armés de Sprite et de potato chips. Donc, 6 h de vol de Santa Fe à Salt Lake. 1h 30 de Salt Lake a Cody. 4 h de sur place. Une poignée d’heures de plus, perdues de ci de là.

Conduire sur la route pour aller à Shell, s’avéra, disons, compliqué.

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Ghost Ranch: Georgia O’ Keeffe

Ici, mon âme latina est aux anges ! Les gens encouragent, débordent d’idées, rebondissent à tout va. Vous entrez dans un endroit, on vous en conseille un autre. Vous parlez d’un artiste, on vous adresse au prochain. Sur l’échelle de la spontanéité, Santa Fe arrive dans les premières places, c’est sûr. J’étais à peine sortie du Musée Georgia O’Keeffe (mon genre de musée, pas trop grand, élégant, clair, avec des assemblages raffinés, des photos noir et blanc, une superbe sélection de toiles), et déjà on m’avait pointé une autre direction.

Une maison d’artiste, évidemment. Parce qu’ici l’art est partout. Canyon Road, le marché, les rues alentour. Et dans les montagnes, là où personne n’irait le chercher. Les artistes sont arrivés dans la région à la fin du XIXème, attirés par les paysages fabuleux, la quiétude, la tolérance. Dans les années 20, les sanatoriums de Santa Fe comptaient nombre d’artistes et de gens riches et cultivés. Suivirent les gens aisés du Texas, d’Arizona, du Kansas, trop heureux d’échapper à leurs fournaises (Santa Fe est à plus de 2100 m d’altitude). Ce sont tous ces arrivages, toutes ces fortunes, qui ont fait le mix artistique du Nouveau-Mexique d’aujourd’hui.

Il y a cette force phénoménale de la terre qui explose de soleil, de sang calciné collé aux roches. Ce ciel d’une telle teinte qu’il vous prend à la gorge. Je ne connais pas beaucoup de pays qui offrent ça. Le Ghost Ranch, la maison de Georgia O’Keeffe est au bout d’un chemin calciné, encadré par ces rochers démentiels. Elle découvrit le Nouveau Mexique dans les années 20, s’y retira, y peignit, s’en inspira pour le reste de sa vie. En arrivant, je me suis sentie merveilleusement bien. J’ai pensé à cette existence en pleine nature. A ces univers qui n’offrent pas d’échappatoire possible, où on peut avoir la paix, où on n’a plus qu’à être soi. Où l’immensité est une protection contre les ravages du monde, et le moindre village, un sanctuaire (ici Santo Tomas à Abiquiu).

www.okeeffemuseum.org

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Taos autrement

Chez Mabel Dodge Luhan. Pas vraiment un hôtel, pas vraiment une maison d’hôtes, pas non plus un endroit où tout le monde irait. Alors ? Disons, une maison d’hôtes/hôtel,-atelier d’écriture-de peinture-de photographie-de yoga-de méditation-de self discovery… créée, organisée, pour les arts et les artistes. Un vrai nid voué à la culture et aux paysages tout autour.

Mabel Dodge découvrit Taos en 1916. Fille de banquiers de Buffalo, féministe, mécène, bisexuelle, artistes à ses heures, elle était bien décidée à attraper tout ce que le début de siècle offrait aux femmes. Son rêve : créer des colonies d’artistes – ce qu’elle fit partout sur son passage. A Paris, où elle connut André Gide; Dans son palais à Florence où elle reçut Gertrude Stein, à New York, Santa Barbara… On parlait beaucoup du Nouveau Mexique… Elle voulut voir. D’abord elle trouve l’endroit effroyable. Toute cette poussière, ces villages terreux, cela a changeait un peu trop de la la 5eme avenue. Mais la région était splendide, la spiritualité et l’ambiance aussi intense qu’elle l’espérait. Elle fut vite sous le charme. En plus, fait non négligeable, Santa Fe sur lequel elle avait d’abord jeté son dévolu, était déjà prit par une autre femme artiste bien émancipée Alice Corbin Henderson, qui elle, donnait dans la poésie… Mabel se dit que tout compte fait, Taos était un bon point de chute si elle voulait régner seule, en gloire et majesté.

Elle fit venir sa Cadillac pour promener ses artistes-amis, s’habilla style pueblo, plongea dans les trips psychédéliques, Jung et Freud, épousa un indien Tiwa qu’elle avait rencontré en rêve quelques semaine avant, (après Messieurs Evans, Dodge, et Sterne). Sa maison devint the place to be. Elle reçut DH Lawrence, Martha Graham, Willa Cather (prix Pulitzer pour L’un des nôtres), Georgia O’Keeffe qui y vécut avant d’acheter son ranch. Bien plus tard, Dennis Hopper trouva l’endroit parfait pour écrire le script d’Easy Rider et faire venir sa bande de L.A…

En arrivant j’ai pensé à l’Hôtel Chelsea de New-York Un endroit légendaire, sans faste, sans luxe, à part celui de l’ambiance unique (la maison est tout de même inscrite dans le National Register of Historic Places comme le Chelsea). Pas de desk, pas de service d’accueil, pas de voiturier…Et après-midi là, pas un chat non plus. Rien que les pièces ouvertes comme si on allait revenir d’un moment à l’autre, le jardin silencieux, les vieux meubles, les vieux livres, la chaleur dorée… Un vrai retour au « sacré primitif », comme disait Lawrence.

www.mabeldodgeluhan.com

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