«Alors, ça marche ? »
« On verra ».
Voilà la seule réponse que j’ai eue pendant des mois. Mon mari venait de créer son association humanitaire. Rien n’était sûr. Il n’avait pas l’intention de se réjouir d’avance.
Tout a commencé quand je l’accompagnais en missions pour Médecins du Monde. Il y a eu le Bénin, le Rwanda après le génocide, le Cambodge, à Battambang, une région infestée de mines. Il est aussi parti opérer en Ethiopie pendant la guerre de l’Erythrée, dans un hôpital russe d’Addis-Abeba. Un jour, il a prit quelques heures pour aller visiter Lalibela et ses fantastiques temples creusés dans la roche. Quand il est arrivé, le peu de gens qui étaient là n’avaient pas vus un blanc depuis quinze ou vingt ans.
Au Cambodge, nous partagions une maison avec des démineurs américains. Des types de 20, 25 ans, toujours souriants, qui partaient travailler comme on va au bureau. Nous étions sidérés par leur sang-froid, leur détachement même. On disait que 10 millions de mines étaient enfouies dans le pays. A Battambang, à Along Veng, autour des fabuleux temples d’Angkor … Plus de mines que d’habitants. Pour compléter le tableau, elles étaient de toutes sortes, ce qui fait qu’ils avaient plus de chances encore d’y laisser leur peau.
Peu à peu, l’idée lui est venue. Et si au lieu de partir sans cesse il offrait une formation chirurgicale, ici, à Paris ?
L’idée, tout le monde la trouvait excellente. Mais pour la mettre en place, c’était une autre histoire ! On n’imagine pas comme c’est long et fastidieux de créer une association (loi de1901) quand on n’a pas l’habitude. C’est carrément un autre métier. En plus, il y avait les opérations de tous les jours, le temps qui n’est pas extensible… Je ne sais ni comment ni quand tout s’est assemblé, mais un jour, tout a prit forme, le premier chirurgien était là.
L’association Chirurgie Plus existe maintenant depuis deux ans. Chaque mois, Bertrand reçoit un nouveau chirurgien d’un pays défavorisé, organise son planning avec sa secrétaire Véronique, le loge à Paris dans un studio prêté par un ami, contacte les patrons des grands services parisiens pour qu’il puisse apprendre ce qui l’intéresse. C’est pratique, rapide, immédiatement efficace. A ce jour, l’association a accueilli une vingtaine de chirurgiens.
Il va sans dire que sans le logement mis à disposition, ce ne serait pas possible. Sans les chirurgiens parisiens qui reçoivent leurs confrères, non plus ; Sans nos amis, la famille, tous ceux qui ont répondus tout de suite, qui ont compris que c’était à ce moment précis qu’il fallait être là, évidemment non plus. Nous avons eu des aides de gens riches, de gens modestes, de gens qui ne nous connaissaient pas une heure avant. On était ahuris.
Pourquoi je vous raconte tout ça ? Parce que je vous donnerai des nouvelles de l’ACP de temps en temps. Alors à bientôt !